En 2025, la Caisse Nationale de Retraite des Agent·es des Collectivités Locales (CNRACL) célèbre quatre-vingts ans d’existence. Créée par l’ordonnance du 17 mai 1945, cette institution assure la retraite et la sécurité sociale de près de deux millions de fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, ce qui en fait le deuxième régime de retraite de base en France, couvrant environ 8 % des cotisants du pays. À l’occasion de cet anniversaire, la Fédération CGT des Services publics réaffirme son engagement pour la défense de la CNRACL, de ses principes fondateurs et des droits des agent·es du service public.
1. LA CNRACL, PILIER DE LA SOLIDARITÉ INTERGÉNÉRATIONNELLE
La CNRACL repose sur le principe de la répartition : les cotisations des actif·ves et de leurs employeurs financent directement les pensions des retraité·es, garantissant ainsi une chaîne de solidarité entre générations. Ce modèle, choisi par la Nation il y a quatre-vingts ans, constitue un choix de société majeur. Il s’oppose aux logiques de capitalisation qui individualisent les risques et fragilisent la protection sociale.
Pour la CGT, la répartition est un socle essentiel : elle permet de lutter contre la précarité des personnes âgées, de garantir des pensions dignes et de maintenir un lien social fort entre les générations. Face aux attaques récurrentes contre les régimes spéciaux, la CGT défend la spécificité de la CNRACL, qui assure une protection adaptée aux réalités des métiers territoriaux et hospitaliers.
La CNRACL assure la couverture des risques de vieillesse et d’invalidité des agent·es de la fonction publique territoriale et hospitalière, soit 2,2 millions de cotisant·es, dont 63 % relèvent de la fonction publique territoriale. Elle verse des prestations vieillesse à 1,3 million de pensionné·es de droit direct, ce qui représente 7 % des effectifs de retraité·es de droit direct en France. Les pensions versées par la CNRACL représentent 7 % des dépenses totales de retraite dans le pays.
Cependant, ce modèle de solidarité est aujourd’hui directement menacé par les politiques du gouvernement. Alors que le retour à l’âge légal de 62 ans représenterait un coût limité (3 milliards d’euros en 2025, soit moins de 1 % du budget total des retraites), le gouvernement refuse toute concession et s’accroche à la réforme instaurant la retraite à 64 ans, malgré l’opposition majoritaire de la population et des syndicats. Pire, il envisage d’ouvrir la porte à la capitalisation en confiant une partie de nos retraites aux fonds spéculatifs, ce qui mettrait en danger la sécurité des pensions et la stabilité du système.
Face à ces attaques, notre fédération réaffirme son opposition à toute réforme qui remettrait en cause le principe de répartition, à toute extension de la capitalisation et à toute mesure qui ferait porter aux retraité·es le poids des choix politiques et économiques du gouvernement.
2. FONCTIONNEMENT DÉMOCRATIQUE ET RÔLE DE LA CGT
La gouvernance de la CNRACL se distingue par sa dimension démocratique, la dernière caisse dont les représentant·es sont élu·es. Son conseil d’administration est paritaire : il rassemble des représentant·es élu·es des affilié·es actif·ves et retraité·es, des employeurs, ainsi que des membres de droit issus des ministères. Cette organisation permet une gestion transparente et collective où chaque partie prenante peut faire entendre sa voix.
La CGT joue un rôle moteur au sein de la CNRACL. Elle en assure la première vice-présidence. Ses administrateur·rices élu·es portent nos revendications et défendent les droits des agent·es.
3. LES ENJEUX ACTUELS ET LES LUTTES DE LA CGT
La CNRACL est aujourd’hui confrontée à de nombreux défis. Les réformes successives des retraites tendent à aligner les régimes particuliers sur le régime général, remettant en cause des droits acquis et fragilisant la protection sociale des agent·es. La baisse des plafonds de ressources pour les aides sociales prive de nombreux·euses retraité·es d’un soutien essentiel, aggravant les situations de précarité.
La compensation financière imposée à la CNRACL au titre de la solidarité inter régime d’un montant de 100 milliards d’euros, pèse lourdement sur l’équilibre du régime. La Cour des comptes et plusieurs inspections générales ont récemment souligné la dégradation des comptes de la CNRACL, due notamment à la détérioration du ratio démographique (passé de plus de 4 actif·ves pour un·e retraité·e dans les années 1980 à 1,46 en 2022), à la hausse du nombre de pensionné·es (+4,5 % par an en moyenne de 1980 à 2022) et à la stagnation, voire à la baisse, du nombre de cotisant·es (-0,3 % par an en moyenne entre 2016 et 2022).
L’augmentation du nombre de retraité·es et la baisse du nombre de cotisant·es — le ratio actif·ves/ retraité·es est ainsi passé de plus de 4 dans les années 1980 à seulement 1,46 aujourd’hui — fragilisent l’équilibre financier du régime. Selon la Cour des comptes, cette dégradation pourrait entraîner une baisse du niveau des pensions à moyen terme ou une augmentation des cotisations pour les agent·es encore en activité. Le déficit annuel de la caisse devrait passer, à droits constants, de 3,5 milliards d’euros fin 2023 à 11,1 milliards en 2030, ce qui menace directement la pérennité du système.
Le gel de la valeur du point d’indice, le développement des régimes indemnitaires, l’augmentation des recrutements sous contrats, quelle qu’en soit la forme, la baisse du recrutement des fonctionnaires affilié·es à la CNRACL entraînent une baisse des recettes. Alors que, dans le même temps, le nombre d’agent·es partant à la retraite est en croissante augmentation. De plus, contrairement au régime général, la CNRACL doit prendre en charge les périodes dites non contributives telles que les majorations de pension pour enfants ou les validations entières des périodes cotisées à demi-traitement du fait de congés maladie…
Il est urgent que l’État assume les conséquences des politiques régressives qu’il a menées ces dernières années. Comme pour le SRE (système de retraite pour la fonction publique d’État), l’État doit être garant de l’équilibre financier de la CNRACL et de sa pérennité.
La CGT s’oppose également à la hausse des cotisations patronales, qui passera de 31,65 à 34,65 % en 2025 à 43,65 % en 2028, sans effet sur le salaire net des agent·es, ce qui pèse sur les collectivités locales et les hôpitaux sans améliorer la situation des affilié·es.
La CNRACL demeure un régime solide, avec une gestion reconnue et une espérance de vie à 65 ans des affilié·es légèrement supérieure à la moyenne nationale (21 ans et 11 mois contre 21 ans et 4 mois). Cette longévité s’explique en partie par la nature des métiers de la fonction publique territoriale et hospitalière qui bénéficient d’un suivi médical et d’une prise en charge globale des risques professionnels. Toutefois, cette moyenne masque de fortes disparités : certains métiers, notamment ceux exposés à la pénibilité ou à des horaires décalés, connaissent une espérance de vie plus réduite, ce qui souligne l’importance de la reconnaissance de la pénibilité dans le calcul des droits à la retraite.
4. CONCLUSION : 80 ANS DE CONQUÊTES SOCIALES, 80 ANS À DÉFENDRE
Les 80 ans de la CNRACL sont l’occasion de rappeler que ce régime est le fruit de luttes syndicales et de choix politiques en faveur du progrès social. Face aux attaques, notre Fédération appelle à la mobilisation pour sauvegarder la CNRACL, garantir des retraites dignes et défendre le service public.
«La CNRACL est utile, la sauvegarder c’est vital.»
La Fédération CGT des Services publics poursuit sans relâche son action auprès des agent·es et des retraité·es affilié·es à la CNRACL, en menant des campagnes d’information, en participant activement à la gouvernance démocratique de la caisse et en organisant des mobilisations collectives pour défendre la justice sociale et la solidarité intergénérationnelle. Au sein du conseil d’administration de la CNRACL, la CGT porte nos revendications.
L’année 2025 est marquée d’ores et déjà par plusieurs temps forts de mobilisation. Ces mobilisations témoignent de la volonté collective de défendre nos conquis sociaux, de reconquérir la Sécurité sociale pour toutes et tous, et de s’opposer aux réformes qui remettent en cause le principe de répartition et la pérennité du modèle de la CNRACL.
Plus que jamais, notre stratégie de mobilisation doit nous conduire à construire un processus de mobilisation intergénérationnelle et interprofessionnelle, c’est tout le sens la journée de grève et de manifestations du 5 juin prochain.
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