Mémoire des Luttes
Au cours du colloque "syndicalisme, pouvoirs et politique dans les services publics territoriaux" organisé par l'Institut d'Histoire Sociale de la fédération CGT des Services Publics les 12 et 23 septembre 2019, Laurent Trémentin raconte « Combativité et indépendance syndicale : la grève des maîtres-ouvriers de la mairie de Nanterre, juin 1978 ».
Laurent Trémentin a été embauché comme menuisier à la mairie de Nanterre en janvier 1977. Il adhère à une très forte section syndicale des ouvriers de la ville. Au début du printemps 1977, une sanction disciplinaire est infligée à un camarade maçon, provoquant de vives réactions ; la sanction est levée.
Il y a alors plus de 600 syndiqués à la CGT ; un jeune et très actif militant, permanent, remplace au secrétariat général une camarade femme de service des écoles. L’imbrication entre pouvoir municipal et syndicat est très forte ; les grèves sont payées et les autocars municipaux emmènent les manifestants à Paris.
En mai 1978, un décret permettant d’améliorer la carrière des ouvriers professionnels (O.P.) est paru. Tous les OP2 arrivés au 6e échelon peuvent être nommés maitres-ouvriers ; à Nanterre ils sont 70 concernés et le syndicat réclame pour eux l’application du décret. La direction municipale annonce ne vouloir nommer que ceux qu’elle aura choisis !
Une bonne partie des concernés est en fin de carrière, ce sont des vieux routiers du syndicalisme. Assemblées générales et débrayages montent en puissance, la municipalité y va de ses coups de violon. La direction du syndicat est sans faille, le soutien de l’Union Locale et celui de la Fédération s’imposent. Les grévistes, environ 80 % de l’effectif, tiennent le coup pendant 23 jours, informant les autres collègues et la population sur les marchés. Nous osions faire grève contre nos bienfaiteurs !
Les agents de maîtrise (surtout ceux qui avaient bénéficié de promotions « maison ») créent un syndicat UFICT pour marquer leur désaccord (il restera jusqu’aux années 90 un agréable club de discussion). Fin juin, une ultime négociation permet des avancées en augmentant le nombre des nommés. La grève est suspendue et la « boite en fer », nourrie par une grande solidarité, partagée équitablement.
Début septembre, le mouvement reprendra sous forme de débrayages de 59 mn. Les fondements du principe d’indépendance syndicale qui anime la nouvelle Fédération des services publics en cours de création étaient posés. Avec le temps, les 70 OP2 possibles ont fini par être tous nommés maîtres-ouvriers, le dernier en octobre 1981.
Source : Mémoires d'Avenir n°17 de l'IHS FdSP
Succès 1978
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